Tantra et Démographie
On peut se demander quel est le rapport entre le Tantra et la situation démographique de la planète ?
Aucun sujet d’actualité ne me paraît aussi important que celui de l’explosion démographique que connaît le monde actuellement, et je trouve incroyable que si peu d’attention ne soit dévolue à ce sujet dans les médias ! J’entends ou je lis souvent l’expression « Il faut sauver la planète »... Cela me semble pour le moins inapproprié, car la planète continuera à vivre pendant encore plusieurs milliards d’années, et des créatures telles que les rats ou les cancrelats continueront à s’y développer quoi qu’il arrive! Mais c’est bien les êtres humains qui risquent de disparaître si la courbe actuelle des événements n’est pas infléchie (et aussi les espèces d’animaux supérieurs tels que les chimpanzés, les éléphants ou les dauphins).
J’ai très précisément la vision de l’humanité comme celle d’un homme assis sur la branche d’un arbre qu’il est en train de scier, tout en se plaignant que telle ou telle feuille de l’arbre est un peu jaunie. C'est-à-dire que la plupart des êtres humains s’occupent de questions secondaires alors que d’autres questions mériteraient toute leur attention, en particulier celle de l'explosion démographique que connait la planète, et de la pression de plus en plus forte que cela crée sur notre environnement, et en définitive sur notre survie. Oui, il faudrait penser à la démographie le soir en s’endormant, en parler avec ses proches le matin au petit-déjeuner, et faire quelque chose de concret à ce sujet pendant la journée !
Par exemple, si rien ne change, l’Afrique à elle seule devrait compter 5 à 6 milliards d’habitants à la fin du siècle ; et le Nigéria, qui en compte aujourd’hui 180 millions, devrait atteindre les 700 à 800 millions. Peut-on se représenter ce que cela signifie à la fois pour l’Afrique et pour l’ensemble du monde ? Le taux de natalité moyen des femmes en Afrique est aujourd’hui de 5 enfants, un taux qui était parfaitement adapté à la survie et au développement de l’espèce lorsqu’une grande partie des enfants mourait en bas-âge, et que les guerres et les épidémies en emportaient encore un grand nombre avant d’atteindre l’âge adulte. Ce qui est le cas pour l’Afrique l’est aussi dans des proportions variables pour la plupart des autres pays du monde, à l’exception de l’Europe et de l’Amérique du Nord.
Les titres à sensation des médias ont tendance à nous faire croire que nous vivons dans un monde violent et dangereux, où de nombreuses personnes sont tuées à chaque instant. En fait, si l’on se dégage de la séduction des événements immédiats pour avoir une image globale appuyée sur des statistiques, on se rend compte que l’humanité n’a sans doute jamais vécu dans un monde aussi sûr, ni avec aussi peu de mort violente ou par maladie (avant un âge avancé). A l’encontre de croyances souvent répandues, l’action d’organismes tels que l’ONU est globalement efficace, et à l’exception de la Syrie, il n’y pas de conflit créateur d’un grand nombre de décès aujourd’hui dans le monde. Il suffit de feuilleter un livre d’histoire pour constater que ce n’était pas le cas dans le passé, et qu’une multitude de conflits et de guerres avaient lieu dans les royaumes, comtés, duchés etc…
Par exemple en Russie la campagne de Napoléon a causé au total sans doute plus d’un million de morts, et la seule bataille de Stalingrad, pendant la deuxième guerre mondiale, près de deux millions. La peste noire a détruit environ un tiers de la population en Europe, et de nombreux pays et îles dans le monde perdirent 80 à 95 % de leurs habitants suite à des épidémies transmises par des conquérants ou des visiteurs venus de loin. Pour construire son immense empire, Gengis Khan aurait fait périr prés de 40 millions de personnes, ce qui représente une fraction considérable de la population de l'époque. Et on pourrait multiplier ces exemples presque à l’infini…
Faut-il regretter ces développements de la conscience humaine, de l’hygiène et de la diplomatie, qui ont permis une régression très importante de la mortalité ? Non bien sûr ! En fait il est bon de se rappeler cela de temps en temps, et d'apprécier tous les éléments positifs des conditions de la vie sur Terre aujourd'hui ! Mais il est aussi essentiel d’adopter une régulation de la fécondité adaptée à ces nouvelles conditions de vie.
Cela se heurte à au moins deux obstacles majeurs, l’un d’ordre culturel (au sens large du terme) et l’autre d’ordre politique. La quasi-totalité des religions ont enseigné, et enseignent encore aujourd’hui, que le but de la sexualité humaine est la procréation. Ceci est un message enraciné de façon si profonde dans l’inconscient collectif qu’il est très difficile d’échapper à cette injonction, malgré tous les changements liés au mariage et aux relations amoureuses.
Un aspect majeur du rapport de force politique a toujours été la loi du nombre. Cela a poussé chaque groupe et sous-groupe humain, qu’il soit d’ordre national, idéologique, religieux ou autre, à encourager la prolifération de ses membres, et cela continue encore de nos jours dans beaucoup d’endroits. C’est le cas par exemple en Inde entre la majorité hindoue et la minorité musulmane ; ou encore en Iran, où le gouvernement a remis en cause il y a quelques mois l’action des centres de planning familial, afin de développer la natalité et donc le poids démographique du pays…
Comment le Tantra peut-il d’une façon unique, et peut-être déterminante, contribuer à apporter des réponses à ces différents problèmes ? Le Tantra est, avec le taoïsme, la seule voie spirituelle qui offre une vision différente du sens profond de la sexualité. Ainsi, pour le Tantra, la procréation n’est pas le but ultime de l’énergie sexuelle (bien que cela soit et en restera toujours un aspect important), mais bien le renouveau de l’être humain et son éveil intérieur. Le Tantra enseigne comment faire circuler l’énergie vitale, qui se manifeste au niveau du chakra-racine en tant que désir et activité sexuelle, à d’autres niveaux de l’être, afin que cette même énergie devienne sensualité et joie de vivre au deuxième chakra, vitalité et puissance personnelle au troisième, empathie et amour inconditionnel au niveau du cœur, expression et créativité à celui de la gorge, intuition et sagesse au troisième œil, et finalement extase et fusion avec le divin au niveau de la couronne.
Le Tantra enseigne tout cela, et il offre aussi une vision différente du rôle de la femme, qui n’est plus « ni pute, ni soumise » comme l’exprime une organisation célèbre, mais où elle devient initiatrice de l’homme vers cette nouvelle expression de l’énergie sexuelle, tout autant que guérisseuse, chamane et d’autres rôles spirituels importants. Avec la diffusion croissante du Tantra dans la société, un nombre de plus en plus important de femmes serait naturellement amené à délaisser le rôle traditionnel de procréatrice, et à s’investir dans celui d’initiatrice. Le rôle féminin majeur du futur n’est pas celui de la femme qui engendre de nombreux enfants, mais celui de la « Shakti » qui donne naissance à une nouvelle femme, un nouvel homme, et un nouveau monde.
En mettant ses pratiquants en contact avec leur source intérieure de bonheur et d’extase, le Tantra permet aussi de prendre beaucoup de recul par rapport aux fonctionnements habituels liés à la recherche d’influence et de pouvoir sur l’autre, et donc de remettre en cause la politique du nombre. En permettant de connaître ses désirs réels et de les satisfaire, non par la répétition d’actes de consommation à tous les niveaux, mais par l’immersion dans la source de son être et des échanges profonds avec d’autres personnes ayant la même ouverture, le Tantra aide les êtres humains à se libérer peu à peu de l’avidité permanente qui est à la source du « toujours plus ».
On voit donc que la pratique du Tantra n’a pas seulement comme but l’évolution personnelle ou une plus grande harmonie du couple, mais que sa diffusion à une échelle significative dans la société pourra avoir des retombées majeures et faciliter les transitions nécessaires pour notre avenir.
Chetan, Avril 2015